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La mode obligée de se mettre au vert

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Dans le cadre de son opération "Fashion Duel", Greenpeace est allé shooter en Chine. Une série parodique qui dénonce les atteintes à l'environnement causées par l'industrie de la mode.FORT DE SES TROIS PRÉCÉDENTS SALONS PARISIENS consacrés au luxedurable, l’organisation 1.618 a lancé, le 10 avril, le premier guide virtuel voué au sujet avec une sélection de marques engagées et, en parallèle, un cycle de formation pour aider les sociétés à se mettre au vert.
Une initiative qui fait écho au slogan “Let’s clean Up Fashion !” (Nettoyez la mode !), que l’on pouvait lire, lors des derniers défilés de Milan, New York ou encore Paris, sur des affiches collées sur les vitrines des boutiques de mode ou des banderoles brandies au milieu des fashionistas par des militants de Greenpeace.

L’organisation écologiste poursuivait son opération “Fashion Duel”, lancée à l’automne, qui distribue bons et (surtout) mauvais points aux marques prestigieuses. Ses critères ? La responsabilité sociale et environnementale bien sûr, mais surtout la transparence. L’ONG exige de tout savoir sur l’engagement du luxe à “développer durable”. Sinon c’est la pastille rouge. Mais pour les marques de luxe, communiquer sur ce thème est un champ miné. Même les plus éco-vertueuses refusent de poser leurs Stiletto sur ce terrain glissant.

“Les grandes marques s’autocensurent, déplore Barbara Coignet, fondatrice de 1.618, le premier salon du luxe durable, qui peine à convaincre les grands groupes de participer et compte, côté mode, des créateurs indépendants comme Valentine Gauthier ou Norlha, qui fait fabriquer des étoffes en fil de yack par des artisans de l’Himalaya. “Mais, aujourd’hui, rester discret, ce n’est pas payant. Elles devront inéluctablement communiquer sur le sujet”, analyse Dominique Royet, consultante en développement durable pour les sociétés de luxe et coauteure du blog CitizenLuxury.

Le vert, tous les grands groupes ont compris que c’est tendance et stratégique, et la plupart se sont déjà sérieusement impliqués. Hermès, par exemple, est connu pour son contrôle obsessionnel de tous les maillons de la chaîne de fabrication, et LVMH a mis en place dès 1992 une équipe spécifique pour l’environnement, qui compte aujourd’hui huit personnes. En 2011, Kering (ex-PPR) a aussi dévoilé son plan pour modifier en profondeur l’empreinte écologique et sociale de l’entreprise. Mais lorsqu’on leur tend un micro, c’est silence radio…

 

Lors de la dernière Fashion Week, des activistes de Greenpeace ont manifesté pour réclamer que les marques de mode en finissent avec la déforestation et les produits toxiques.

 

POURQUOI TANT DE MODESTIE ? “Le luxe souhaite qu’on achète de la beauté et du rêve. Or quand on communique sur le développement durable, ce n’est plus le rêve qu’on vend, mais une forme de réalité”, suggère Dominique Royet. Une réalité qui fleure l’angoisse, l’exploitation, la déforestation et les cours d’eau pollués… Autre difficulté : quand elles parlent, les marques sont souvent accusées de faire du greenwashing, c’est-à-dire de mettre en avant, à des fins marketing, des engagements sociaux ou environnementaux insuffisants ou inexistants.

“Elles craignent aussi qu’on les accuse de ne pas être 100 % irréprochables,constate Barbara Coignet. Mais personne ne l’est ! Le développement durable est en évolution permanente. Il faut donc qu’elles acceptent d’être transparentes. Qu’elles disent ce qu’elles réussissent à faire, et ce sur quoi elles travaillent encore.” Mais reconnaître qu’elles ont des limites, qu’elles ne maîtrisent pas tout, ce n’est pas dans l’ADN du luxe.

Malgré tout, sous la pression des ONG et la conscience grandissante des consommateurs, les marques n’ont plus le choix : il leur faut trouver les bons mots. En 2007 déjà, elles avaient senti le vent du boulet quand le WWF avait noté pour la première fois leurs pratiques dans son rapport “Deeper Luxury”. Sur une échelle de 1 à 100, les trois premiers, L’Oréal, Hermès, LVMH, n’avaient obtenu que 65.

 

L'organisation 1.618 tente de sensibiliser les maisons de mode à l'environnement, comme lors d'une projection au Palais de Tokyo, en 2010.

 

Or, comme l’explique Jean-Noël Kapferer, spécialiste des marques à HEC et coauteur de Luxe oblige (2008, éd. Eyrolles) “les agences de notation financière surveillent la réputation des marques et tout ce qui pourrait l’entacher. Ces ONG représentent un risque réputationnel”. Il constate également que les marques sont dorénavant obligées de prendre leurs précautions et de distiller des informations par le biais de leurs sites Internet : “Elles ne vont pas faire de campagne de publicité sur ce qu’elles font – ce serait prendre le risque d’un effet de retour. Mais si vous voulez savoir, les informations sont disponibles.”

Effectivement, la plupart des sites proposent des onglets “environnement”, “bilan développement durable”, “fondations d’entreprise”… Sur celui de Valentino, seule pastille verte de Greenpeace, on trouve en quelques clics les “comptes de résultat environnemental” et “code de conduite des affaires”. Pas très glamour, mais sérieux. “Le Web est la meilleure des solutions, estime Dominique Royet. Il y a des histoires à raconter, des films à faire, des preuves à transmettre.” Après le silence assourdissant, la Toile, donc, permettrait de faire résonner cette nouvelle et discrète communication.

Julie Pêcheur

Source : Le monde.fr

Date de parution originale du 28/04/2013

 

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